Le processus révolutionnaire syrien vit des heures difficiles plus de trois ans après le début du soulèvement populaire pour la liberté et la dignité contre la dictature du régime Assad, qui vient d’organiser début juin un simulacre d’élection démocratique, dénoncé par les révolutionnaires comme les élections du sang, qui a vu la victoire du dictateur Bachar al Assad. Cela malgré un très large boycott et l’impossibilité de millions de Syrien-nes de voter.
Une situation sociale catastrophique
La situation sociale et humanitaire s’est encore dégradée en Syrie. Le pays est fortement touché par la pauvreté, trois personnes sur quatre vivaient dans la pauvreté à la fin de 2013, avec plus de la moitié de la population (54,3%) vivant dans l’extrême pauvreté incapables d’obtenir des produits alimentaires et non-alimentaires les plus élémentaires nécessaires à la survie de leurs ménages.
Il faut également se rappeler que plus de 45% de la population syrienne sont des déplacés internes ou des réfugiés à l’étranger.
La contre révolution a plusieurs visages
Le mouvement populaire syrien fait également face à plusieurs menaces contre révolutionnaire, tout d’abord la guerre continue et massive du régime Assad contre le peuple révolutionnaire syrien aidé par ses alliés Russes, Iraniens et du Hezbollah n’a pas cessé et a d’ailleurs enregistré des victoires militaires importantes comme la reprise de la ville de Homs. Le régime n’a également pas cessé de bombarder les quartiers libérés d’Alep depuis Janvier 2014, provoquant la mort de plus de 2000 personnes. La propagande du régime de la « guerre contre le terrorisme », qui est repris également par le dictateur Sissi en Egypte et d’autres monarchies réactionnaires du Golfe, trouvent aussi de plus en plus d’échos au sein des pays occidentaux dans leurs mesures répressives et liberticides pour soi disant faire face à la menace « jihadiste » en Europe.
L’autre visage de la contre révolution est représenté par les groupes islamistes et jihadistes qui s’opposent aux objectifs de la révolution syrienne (démocratie, justice sociale et non au communautarisme) et n’hésitent pas à s’attaquer aux révolutionnaires dans les régions dites libérées. Ces groupes ont profité en premier lieu de « l’amnistie » accordée par le régime à de nombreux islamistes et jihadistes au début de la révolution tandis que les démocrates et autres révolutionnaires continuaient de croupir en prison et à se faire assassiner par le régime, tandis que le régime de Assad ne les combat pas systématiquement comme à Raqqa la ville occupée par l’Etat Islamique d’Iraq et du Levant (EIIL) épargnée par les bombardement depuis son occupation par ce dernier, et en second lieu du soutien financier des monarchies du Golfe qui voulaient transformer cette révolution populaire en guerre sectaire.
Mais la révolution n’est pas morte…
Le mouvement populaire, malgré tout, continue à faire entendre sa voix contre tous ceux qui s’opposent aux objectifs de la révolution.
Lors de la pièce de théâtre pour la ré-élection du dictateur de Bashar Al Assad, des groupes d’activistes ont le jour des élections et avant distribué des flyers et brochures dans le plus secret dans des villes et zones sous la domination du régime, comme à Damas, Alep et Hama condamnant les crimes de ce dernier et réitérant leur volonté de continuer leur révolution jusqu’à la victoire, tandis que des manifestations avaient lieu dans de nombreuses zones libérées pour dénoncer les « élections de sang ». On a également vu certains révolutionnaires dans les zones libérées transformés des poubelles en soi disante en boîtes de vote sur lesquelles étaient écris «Vous pouvez voter ici», «On te jette, Bachar,” et “Bachar, c’est là que tu résides ».
En même temps des actions ont également été organisés ces dernières semaines contre les groupes jihadistes et islamistes. Dans la ville de Minbej, proche d’Alep, occupée par EIIL, une grève générale avait été décrété fin mai par les habitants de ville pour protester contre l’occupation de la ville par ce dernier. Un groupe d’activistes syrien-nes ont également lancé une campagne pour demander la libération des quatre révolutionnaires (Razan Zeitouneh), des symbole du soulèvement populaire et de la lutte contre le régime, qui ont été kidnappé en Décembre 2013 très vraisemblablement par le Front islamique qui avait déjà menacé les activistes dans le passé. Des manifestations ont eu lieu par exemple dans la ville de Douma, proche de Damas, et dans le quartier de Salah el-Din à Alep sous le slogan : « Traitre est celui qui kidnappe les révolutionnaires ».
Pour rappel en mars 2014, de nombreuses manifestations et activités avaient eu lieu pour commémorer le troisième anniversaire du début de la révolution syrienne et rappeler ses objectifs, dont des expositions de photos et autres et pièces de théâtres dans des zones libérées comme à Alep et dans la région d’Idlib. De plus en Janvier 2014, une explosion populaire dans de nombreuses zones libérées avait poussé vers la sortie l’EIIL et poussé d’autres groupes armées à combattre ce dernier, notamment d’autres groupes islamistes réticents au début mais qui sous la pression populaire n’avaient pu faire autrement que de combattre l’EIIL.
La révolution syrienne fait partie intégrante des processus révolutionnaires de la région et de ses dynamiques, et toute tentative de les séparer doit être combattu. Les révolutionnaires en Syrie combattent comme les autres activistes dans les pays de la région pour la liberté et la dignité. Dans ce combat, ils combattent les régimes autoritaires et les groupes islamistes et jihadistes qui s’opposent à leurs objectifs.
Comme écrivait des révolutionnaires syriens : « Les ennemis sont multiples… la révolution est une… et elle continue ». Le mouvement populaire syrien n’a pas dit son dernier mot….
Article publié dans le journal SolidaritéS n 250 18 juin 2014.